Confrontés à la nécessaire adaptation de l’entreprise à une économie en pleine transition numérique, de nombreux dirigeants reportent la responsabilité de la transformation numérique sur leur top management et la mise en oeuvre de chantiers de réorganisations qui bouleversent plus qu’ils n’aident cette transition. Préférant se concentrer sur la sphère financière pour la recherche de croissance et de rentabilité, plutôt que sur la redéfinition de la stratégie, du business model et de la relation client, ce type de comportement finit par complexifier plus que par simplifier la transformation. Comme nous aimons à le dire chez The ThinkLab, la simplicité consiste à donner de l’ordre à la complexité. Alors, simplifions par la présentation des 8 axes sur lesquels les dirigeants doivent concentrer leurs efforts.
Le dépassement d’une vision purement technologique de la transformation digitale
L’enjeu de la transformation digitale n’est pas de se concentrer sur la technologie, de déclarer mettre le Big Data au coeur de l’entreprise ou de vouloir développer des objets connectés en signe d’innovation, de déclarer la nouvelle stratégie « Mobile First » ou « data driven ». La transformation digitale des entreprises mérite mieux que ces déclarations de principe abusant des termes qui font briller dans les diners d’affaire. L’enjeu est l’humain.Comme l’affirme Nicolas Petit, General Manager COO de Microsoft France :
» Toutes les transformations qui réussissent reposent sur un vrai effet de transformation culturelle, dont le numérique est seulement un accélérateur. Une transformation digitale réussie pour une direction ou un CDO, c’est 20% de technologie,80% de culture, et 100% d’humain. Faire changer la culture, ça ne se décrète pas.Ça se coconstruit avec les gens de manière très graduelle, très progressive (…). La capacité à accompagner et à faire évolue les collaborateurs de manière individuelle est fondamentale. Le faire prédomine sur la théorie. Il ne suffit pas d’essayer de vouloir dupliquer les façons de travailler d’une autre entreprise. Il existe plusieurs chemins. Chaque entreprise possède un patrimoine technologique, application, organisationnel qui est extrêmement différent d’une entreprise à une autre. (…) L’adaptation au contexte culturel est indispensable. »
La recherche de productivité dans l’entreprise
Les dirigeants doivent adopter une vision différente de la productivité au travail grâce au management compassionnel, et dans une moindre mesure la recherche d’efficacité grâce aux aux outils numériques qui simplifient les workflows. Les dirigeants qui adoptent une approche orientée vers la productivité doivent réduire significativement la déperdition liée à la structure organisationnelle, s’assurer que les talents sont à des postes clefs permettant d’avoir le plus d’impact sur la croissance de l’entreprise, et mettre tout en oeuvre pour tirer parti de la motivation des employés et de leur capacité à être source de proposition en collaboration avec les ressources humaines et le management. Une étude du Boston Consulting Group a montré qu’entre 1955 et 2010 les entreprises ont moins souffert de la complexité croissante de l’environnement que de la complication organisationnelle qui s’est accrue de 50% à 350% selon les entreprises avec la multiplication des procédures, des strates hiérarchiques, et des systèmes de coordination.
La recherche d’efficacité vis-à-vis des clients
Une entreprise n’a pas vocation à proposer des produits ou des services mais à proposer des solutions à ses clients. C’est là l’enjeu de la nouvelle vision centrée sur le client ou utilisateur des produits et services : comprendre ses clients et leur proposer une solution, plutôt que de créer des produits et services censés correspondre à des profils clients projetés ou fantasmés à partir de cibles marketing. Le marketing est malheureusement souvent devenu une science plus théorique qu’expérimentale, comme Byron Sharp l’a démontré dans son ouvrage « How Brands Grow » (mettre un lien vers le livre). Il faut revenir aux fondamentaux du marketing en écartant les nombreuses théories dont l’efficacité n’a jamais pu être prouvée mais qui sont sans cesse enseignées, et replacer le curseur de la valeur sur la satisfaction client.
L’impulsion d’une dynamique d’innovation
Là encore, il ne faut pas réduire l’innovation uniquement à une rupture technologique, que l’on parle d’une « killer app », d’un objet connecté disruptif, de l’ubérisation d’un secteur. Il faut éviter de subir le dilemme de l’innovation. L’idée n’est pas de vouloir à tout prix concevoir une innovation technologique. L’innovation c’est aussi l’amélioration. La logique d’innovation est soluble dans l’ensemble des départements de l’entreprise, car la recherche de l’optimisation et de l’amélioration concerne autant la R&D que la communication, le marketing, la relation client, et tous ces fameux silos auxquels le numérique permet de créer des synergies. Cette dynamique d’innovation passe par une réorganisation structurelle et de nouveaux modes de travail plus collaboratifs avec un management plus compassionnel pour favoriser la croissance de l’entreprise par une productivité accrue.
Le développement d’une culture collaborative
Une culture collaboration permet de favoriser le développement des synergies entre les silos de l’entreprise. Il est illusoire de penser que les silos peuvent disparaître. Une entreprise est le fruit de savoir-faire et d’expertises partagés, de talents avec des métiers et processus spécifiques. Les silos sont devenus interdépendants avec la révolution numérique et les départements doivent évoluer vers des équipes pluridisciplinaires aux compétences digitales intégrées. L’Internet et le Web ont fait converger la gestion de la relation client, des stratégies d’acquisition clients aux stratégies de conversion et de fidélisation. Les stratégies sont désormais omnicanales car après tout un client est un client que la transaction ait eu lieu sur un site d’e-commerce ou dans un magasin. Le numérique est devenu le garant de la cohérence de l’expérience client et de l’expérience de marque.
Le développement de l’expertise numérique plutôt que la création d’un nouveau silo
Le numérique ne peut se réduire à nouveau silo. La transformation digitale correspond à un changement de paradigme, de système, qui modifie à la fois la société, l’économie, les pratiques culturelles, l’industrie, la finance, les transports, etc. Ce nouveau système né des synergies de l’ordinateur et de l’Internet recompose notre monde autour des données qu’il produit ou engendre aux quatre coins du monde sans contraintes de temps ni de lieux. Les frontières s’effacent entre commerce et e-commerce, marketing et marketing digital, CRM et E-CRM. L’entreprise et ses clients évoluent désormais dans ce no man’s land où se mêlent online et offline, produits et services physiques ou dématérialisés. Comment l’entreprise pourrait-elle concevoir l’existence de silos numériques dans ce contexte ? La réussite de sa transformation numérique passe par le développement des compétences digitales des managers et des collaborateurs à tous les étages de l’organisation : les RH font face à la dématérialisation des bulletins de salaire, les marketeurs à l’automatisation des campagnes et des tactiques d’activation, les forces de vente à la ludification online de l’animation commerciale et au social selling, les responsables de points de vente à la digitalisation des services, les exemples sont sans fin.
Le développement d’une culture du résultat centrée sur une création de valeur client forte
Comme nous l’avons déjà évoqué l’entreprise a pour objectif de proposer une solution face à une problématique client. L’entreprise doit rechercher sa satisfaction si elle veut assurer sa croissance en gagnant des part de marché. Une entreprise dont le business model est centré principalement sur les coûts ne peut aboutir qu’à un appauvrissement de son offre et à une lutte constante contre des concurrents toujours plus nombreux et compétitifs. Une entreprise dont le business model est centré principalement sur la création de valeur client construit son avenir en restant en phase avec celui-ci. La transformation digitale a pour objectif d’assurer la croissance de l’entreprise grâce à une culture du résultat centrée sur la satisfaction du client. Jeff Bezos, fondateur d’Amazon ne nous contredirait pas.
L’élaboration de stratégies plutôt que de tactiques pour favoriser le long terme
La primauté du court terme est l’ennemi de la transformation digitale. Elle demande analyse, réflexion, sollicitation et implication de l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise. Donc un temps de préparation, de gestion de la transition et le moins de précipitation possible. Elle a pour objectif de construire et consolider la croissance de l’entreprise par l’adoption d’une nouvelle culture, une réorganisation structurelle, la redéfinition du contexte de travail au service de la productivité, le développement des compétences numériques au service de l’efficacité, la redéfinition de la création de valeur client pour atteindre les résultats souhaités, l’élaboration de nouveaux business model, la création d’une dynamique d’innovation dans tous les départements. Une fois cette stratégie définie pour construire le long terme, le temps est aux tactiques pour la mise en oeuvre à court terme et le pilotage de la stratégie par des indicateurs clefs de performance.
Dirigeants et entrepreneurs, c’est aussi et surtout à vous de prendre vos responsabilités et d’engager votre entreprise dans cette dynamique de performance. Une transformation digitale d’entreprise est d’autant plus réussie que son dirigeant prend le leadership digital.